Presse :
Pourquoi Ben Arfa doit jouer, ou pas?
L'Equipe, le 20/01/2015 à 09h40
Hatem Ben Arfa saura mardi si son contrat à l'OGC Nice est enfin homologué par la Commission juridique de la Ligue (LFP), qui doit statuer sur son cas après plusieurs jours d'atermoiements. Les deux issues sont possibles. Nous vous expliquons pourquoi.
Les arguments pour
Pour favoriser le retour en L1 d'un vrai talent et d'un personnage
Rares sont les joueurs capables d’éliminer un adversaire dans un espace réduit ou lancés à pleine vitesse. Rares, aussi, sont ceux qui peuvent faire la différence dans la surface adverse. Hatem Ben Arfa en fait partie. «C'est le joueur le plus talentueux que j'ai vu. Mais il exprime parfois mal son talent», avait dit de lui Kim Källström lorsqu'ils étaient coéquipiers à Lyon (2006-2008). Car si son comportement ballon au pied a souvent impressionné, celui hors du terrain lui a aussi joué des tours. Jean-Michel Aulas, Eric Gerets, Didier Deschamps ou encore Laurent Blanc peuvent en témoigner.
Parce qu'il a déjà assez galéré dans sa carrière
Huit matches joués, c’est le maigre bilan de Ben Arfa depuis six mois. La carrière du milieu offensif de 27 ans, parti brouillé de Lyon en 2008 puis de Marseille en 2011 et loin d’avoir conquis l’Angleterre en quatre ans et demi, à Newcastle puis Hull City, n’a pas été un long fleuve tranquille. Même s’il a souvent été à l’origine de ces frasques, le joueur semble avoir enfin décidé d’avancer. Il n’a donc pas besoin qu’on lui mette d’autres bâtons dans les roues. «C’est un garçon apaisé et réfléchi», a estimé Claude Puel après leur première entrevue. À défaut de l’avoir lancé, le coach niçois aimerait bien être celui qui va le relancer.
Parce que Nice a tenté un pari et doit en être récompensé
À défaut d’avoir de gros moyens financiers (40 millions d’euros de budget, 11e de Ligue 1), Nice a des idées. Ce n’est pas la première fois que le club azuréen décide de recruter un joueur revanchard, en quête d’un nouveau défi. François Clerc en 2010, Camel Meriem en 2011 ou encore Mathieu Bodmer en 2013 n’ont pas coûté grand-chose à l’OGCN et lui ont rendu de bons services. En ciblant Ben Arfa comme recrue prioritaire cet hiver, les dirigeants niçois ont encore prouvé qu’il n’était pas nécessaire de dépenser des millions pour se renforcer. Ils sont surtout passés outre sa mauvaise réputation, pour se concentrer sur ses qualités.
Parce que son match avec les jeunes de Newcastle n'est pas officiel en Angleterre
«Obligé», de son propre aveu, à disputer l'été dernier un match du tournoi des centres de formation avec l’équipe des moins de 21 ans de Newcastle (ndlr: victoire 5-2 contre Reading en PDL, Professional Development League), sous peine d’être «sanctionné», Ben Arfa traîne aujourd’hui ce boulet. Un boulet qui remet en cause l’homologation de son contrat avec Nice. Sauf qu’à la différence de la Fédération française (FFF), son homologue anglaise (FA) ne considère pas cette rencontre comme officielle. «Elle s’en fout complètement», a même estimé le président du Gym, Jean-Pierre Rivère. C’est pourquoi, en cas d’échec en France, l’international français (13 sélections, 2 buts) pourrait encore rebondir en Angleterre.
Parce que l'avis de la Fifa est consultatif
Lorsqu'elle a été sollicitée par la FFF, la Fifa a rendu un avis défavorable sur le dossier, mercredi dernier, mais a aussi immédiatement rappelé qu’il ne s’agissait en rien d’une injonction. «L’instance internationale attire l’attention de la FFF sur le fait que son courrier a un caractère purement informatif et est par conséquent sans préjudice quelconque. La décision appartient aux instances françaises», a-t-elle expliqué. Ce qui, de fait, laisse la porte ouverte à une issue positive.
Les arguments contre
Parce que le règlement de la Fifa est formel
Si Ben Arfa n’a toujours pas porté le maillot rouge et noir de Nice, c’est en raison d’une petite phrase qui s’y oppose dans le règlement des mutations établi par la Fifa. «Un joueur ne peut être enregistré auprès de plus de trois clubs successifs par période allant du 1er juillet au 30 juin de l’année suivante. Durant cette période, le joueur ne peut jouer en matches officiels que pour deux clubs», y est-il mentionné. Or, le gaucher a déjà joué un match avec les moins de 21 ans de Newcastle puis a été prêté lors de la première moitié de saison à Hull City. Oublier cette donnée équivaudrait à enfreindre délibérément les règlements supra-nationaux.
Pour éviter que les futurs adversaires de Nice portent réclamation
Lorient a beau assurer ne pas l’avoir «dénoncé», les instances françaises sont désormais parfaitement au courant du parcours de Ben Arfa cette saison. Dans ces conditions, si sa signature est homologuée, il n’est pas difficile d’imaginer que certains adversaires des Aiglons tenteront de gagner sur ce terrain-là . Comment une équipe se comportera-t-elle en cas de défaite face à Nice après un but de l’ex-surdoué? Portera-t-elle réclamation? C’est une hypothèse à ne pas négliger.
Parce qu'il a déjà un passif avec la FFF
Hatem Ben Arfa n’en est pas à son premier rendez-vous avec les plus hautes autorités du football français. En 2012, après l’Euro auquel il avait participé avec l’équipe de France, l’élément perturbateur avait été «rappelé à l’ordre» par la Commission de discipline de la Fédération. Reconnu coupable d’avoir contesté une décision du sélectionneur de l’époque, Laurent Blanc, il n’a, depuis, plus jamais porté le maillot bleu. Même si l’affaire appartient aujourd’hui au passé, elle pourrait avoir un certain poids au moment de trancher. Le football français n’a peut-être pas envie de lui faire de cadeau.
Parce que partout où il a joué, il a eu des problèmes
Avant d’attirer Ben Arfa sur la Promenade des Anglais, les dirigeants niçois n’ont pas eu besoin d’aller chercher bien loin des renseignements sur le personnage. Car les déboires de Ben Arfa, tout le monde les connaît! En 2008, lors de son transfert à Marseille en provenance de l’OL, son club formateur, le joueur s’était lancé dans un bras de fer avec son futur ex-président Jean-Michel Aulas. À l’OM, c’est avec ses entraîneurs, Gerets puis Deschamps, qu’il était entré en conflit, principalement en raison de son faible temps de jeu. Avant de quitter le club avec fracas, non sans avoir mis à sac le bureau du président de l’époque, Jean- Claude Dassier. À Newcastle, après l’avoir encensé, Alan Pardew a, lui aussi, fini par renoncer... Le scénario se répète inlassablement.
Parce que d'autres ont connu le même sort avant lui
Le cas Ben Arfa n’est pas une première. Une arrivée avortée à Nice s’est même déjà produite récemment, avec Stéphane Bahoken, dont le transfert avait finalement été invalidé par la LFP. Alors pourquoi cette fois, la Ligue devrait-elle faire une exception? Le joueur a beau être plus connu et son CV plus riche, chacun doit être traité de la même façon. Même Alfredo Di Stefano, en son temps, avait connu pareille mésaventure avant d’être autorisé à jouer au Real Madrid. «Il faut faire preuve de bon sens dans ce dossier», espère Jean-Pierre Rivère, le président de Nice, qui ne s’avoue pas vaincu, en dépit des nombreux éléments en sa défaveur.
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