Ces satellites que tout oppose

A la lutte pour une qualification en Ligue des champions, Strasbourg et Nice, propriété de BlueCo et d'Ineos, s'appuient sur des stratégies aux antipodes l'une de l'autre.

Dans l'univers des multipropriétés, presque tout les oppose : la stratégie, les liens avec la maison mère - Chelsea d'un côté, Manchester United de l'autre -, la lisibilité du projet, le développement des jeunes talents, avec en toile de fond l'idée de réaliser de fortes plus-values pour Strasbourg et l'autonomie financière pour l’OGC Nice depuis que son propriétaire Ineos concentre ses efforts sur Manchester United.

Personne ne voyait le Racing aussi haut, contrairement au Gym qui revendique ouvertement un objectif européen avec la sixième masse salariale de la Ligue 1 pour parvenir à ses fins. A six journées de la fin, voilà les deux clubs rattrapés par une ambition commune, la course à la Ligue des champions, et il n'est pas certain que cela fasse les affaires de BlueCo, le consortium qui a racheté le club alsacien en juin 2023.

Strasbourg occupe la même place que Chelsea en Premier League, la 4e, avec une possibilité réelle de prendre part à la deuxième campagne en C1 de son histoire, la première depuis la saison 1979-1980. S'est-il préparé en circonstance ? BlueCo planche activement sur les aspects juridiques avec, au bout de cette réflexion, l'hypothèse d'un blind trust (les actions du club seraient placées dans une fiduciaire, l'équivalent d'un compte bloqué), comme l'avait fait Nice, contraint de couper les ponts avec Ineos l'été dernier.

Dans une circulaire datée du 7 octobre 2024, l'UEFA avait fixé au 1er mars la date butoir pour se mettre en conformité avec les règles en vigueur pour les propriétaires multiclubs pour la saison 2025-2026 : nul ne peut être impliqué simultanément, directement ou indirectement, à quelque titre que ce soit, dans la gestion, l'administration et/ou les résultats sportifs de plus d'un club participant à une compétition interclubs de l'UEFA.

Un projet plus clair à Strasbourg

Quid du «projet BlueCo» en cas de compétition commune ? Rien que cette saison, Djordje Petrovic et Andrey Santos sont prêtés par les Blues au Racing; Diego Moreira a été vendu par Chelsea à Strasbourg en août; et il est prévu que Mamadou Sarr fasse le chemin inverse l'été prochain.

Le Gym, dont les liens avec United sont inexistants, n'a pas ce type de problème. La situation pourrait-elle évoluer si Manchester United (13e de Premier League et toujours en course en Ligue Europa) venait à manquer l'Europe ? En termes de formation ou de prêts de joueurs, le club azuréen ne s'interdit rien.

« Mais aujourd'hui, cela ne semble pas un sujet pour MU de regarder ce qui se passe à Nice, entend-on autour du club. Jean-Claude Blanc (le CEO d'Ineos) se soucie juste que le budget soit tenu. A part ne pas perdre trop d'argent et se préparer à l'éventuelle arrivée d'un autre repreneur, on ne voit pas très bien ce qu'Ineos veut faire du club. La force du Gym, c'est d'avoir un budget qui sauto-alimente avec la vente de 2-3 joueurs, Jean-Clair Todibo et Khephren Thuram l'été dernier, peut-être Evann Guessand, Marcin Bulka, Melvin Bard ou Mohamed-Ali Cho cet été. »

La lisibilité du projet est beaucoup plus claire à Strasbourg avec une structure construite pour faire perdurer les liens : la formation dirigée par Liam Rosenior porte le sceau des deux codirecteurs sportifs de BlueCo. Lawrence Stewart et Paul Winstanley, et du directeur du recrutement général, Sam Jewell.

Au-delà de ses principes de jeu, elle a été portée cette saison par son insouciance, une forme d'osmose et un gardien, Djordje Petrovic, en état de grâce depuis janvier, comme avait pu l'être Bulka avec le Gym l'an dernier. Le Racing restera-t-il hermétique à la pression jusqu'au bout ? C'est lorsque l'OGC Nice s'est invité à la lutte pour la deuxième place que la formation de Franck Haise a baissé le pied.