Franck Haise : « Je connais les contraintes financières »

Au terme d'une saison intense, achevée à la quatrième place, l'entraîneur de Nice, Franck Haise, se projette sur la suivante et sait déjà que l'été sera long, entre la nécessité de vendre pour recruter et les tours préliminaires de la Ligue des champions.

Il est arrivé avec un grand sourire en annonçant, taquin : « Je vais à Rennes ! ». Près de deux mois après avoir confirmé qu'il resterait à Nice l'an prochain, Franck Haise est revenu sur cette saison faite de hauts et de bas et sur les raisons qui l'ont poussé à rester : « Quand je dis quelque chose, ce n'est pas parce qu'un club d'Arabie saoudite me propose 4 M € net que je vais partir. Je ne dis pas que l'argent ne compte pas dans une carrière ou qu'être dans un club peut-être encore plus prestigieux ne compte pas. Mais quand j'ai donné ma parole, je ne vais pas revenir en arrière. »

Pendant une demi-heure, le technicien de 54 ans s'est également projeté sur la saison à venir, qui verra le Gym participer aux tours préliminaires de la Ligue des champions.

- Vous disiez que cette saison a été éprouvante. Au-delà des blessures, qu'est-ce qui l'a rendue si délicate ?
La cascade de blessures, déjà, c'est pas mal. Treize joueurs en moins en Coupe d'Europe, plus 2 pas qualifiés... Je ne vais pas vous redire les noms des joueurs qui ont joué à un moment... Mais jamais ils ne doivent jouer. Après, il y avait des attentes à l'extérieur, avec le public. Je peux comprendre qu'il y ait eu des déceptions. Mais on a essayé de faire au mieux. J'aurais bien aimé qu'il n'y ait que des ambiances comme hier (samedi) . Même si la Sud a toujours été là. Ça compte, un public. Pourtant, Dieu sait que chaque fois que je croise des gens, ils me parlent tous de Nice. Mais venez au stade, putain ! Et le troisième élément, c'est qu'à un moment, il y a eu aussi ces départs dans le staff(*). Forcément, ça crée un peu de tension. Et puis pendant ce temps-là, il fallait que je travaille pour anticiper, recruter.

(*) Laurent Bessière, directeur de la performance, à Rennes, les préparateurs physiques Ghislain Dubois et Sébastien Sangnier, l'analyste vidéo Alexandre Pasquini.

- Le timing de votre annonce, fin mars, c'était pour une raison précise ?
Oui. Parce qu'il y avait justement des départs. Pour Laurent (Bessière) , c'était sorti, il y avait les autres personnes autour... Le prochain, ça va être qui ? Cela va être le coach... Donc, le premier message était pour la direction du club. Parce qu'ils s'interrogeaient aussi, forcément. Après, c'était aussi pour clarifier par rapport au staff, enfin ceux qui resteraient. Et puis, par rapport aux joueurs. Pour certains, ça peut compter quand même.

- Et inciter certains à rester ?
Je n'y crois pas trop. J'ai eu des exemples, à Lens, de joueurs qui sont venus me voir dans mon bureau en me disant : « Coach, je veux qu'on reste tous pour la Ligue des champions. » Et le même, quatre jours après, qui revenait me voir : « « « Coach, je viens d'avoir une proposition, je suis emmerdé. » Je sais comment c'est. Chacun doit mener sa carrière. C'est comme le sta?, chacun décide en son âme et conscience. Les gens, je ne les retiens pas.

« La Ligue des champions, c'est une possibilité. La réalité, c'est la Ligue Europa. Et sur le plan financier, ce n'est pas la Ligue Europa qui va nous permettre de garder certains joueurs »

- Pour certains, vous n'aviez pas les moyens financiers de les retenir. Ces contraintes financières vous inquiètent-elles ?
Je ne peux pas dire que ça ne m'inquiète pas, parce que je préférerais qu'on ait un peu plus de moyens pour être ambitieux en Championnat et en Coupe d'Europe. Mais je connais les contraintes. Un, je ne les découvre pas, parce que quand je suis arrivé l'année dernière, je savais déjà que ce n'était plus le même projet dont on m'avait parlé à une époque. Ensuite, quand je signe, il n'y avait pas les -15 millions de droits tv, que j'aurais préféré qu'on mette dans les transferts ou dans les investissements. Et puis là, de nouveau, on peut passer de 15 à 0 ou du moins à 3, 4, 5. Heureusement qu'Ineos est toujours là. Parce que même si Nice n'est pas la tête d'a?che du groupe, on peut compter dessus.

- Concrètement, cela va-t-il engendrer plus de départs ?
Les départs, on verra. Après, on sait qu'on doit vendre, mais comme l'été dernier, avant de pouvoir acheter. Et même si 4e, c'est une très belle place, ce n'est pas la 3e non plus. La Ligue des champions, c'est une possibilité. La réalité, c'est la Ligue Europa. Et sur le plan financier, ce n'est pas la Ligue Europa qui va nous permettre de garder certains joueurs.

- Vous attendez-vous par exemple à perdre Marcin Bulka ?
Il n'a plus qu'un an de contrat, il n'a pas prolongé. Ça serait la logique. Maintenant, il faut que tout le monde s'y retrouve. Et Marcin ne peut pas partir pour pas grand-chose, juste parce qu'il lui reste un an de contrat. Mais oui, pour tous les joueurs qui sont à un an de la fin de leur contrat, s'il y a des opportunités, on les regardera. Après, il y a des joueurs qui ont plus d'années de contrat ou qui ont de très grosses valeurs marchandes, comme Evann (Guessand) , qui en plus est formé au club. Mais ça ne sera pas dans n'importe quelles conditions non plus. Le mercato de tous les clubs, en tout cas de tous les clubs français, va être long, une fois de plus (une première période du 1er au 10 juin, puis une seconde du 16 juin au 1er septembre) . Il faut rester aussi calmes. Il y a plein d'éléments qui ne vont pas dépendre de nous.

- Avez-vous identifié des besoins ?
Ce qui est certain, c'est qu'il y a d'abord la blessure de nos deux défenseurs centraux droitiers (Youssouf Ndayishimiye et Mohamed Abdelmonem) pour 7-8 mois. C'est un poste où on va devoir chercher. Après, il faut être prêt sur tous les postes.

« Je suis comme Saint-Thomas, je ne crois que ce que je vois. Si j'étais sûr qu'il puisse être opérationnel à 100 %, et pendant une saison, je ne me poserais pas de questions »

- Parmi les choses qui dépendent de vous, il y a la levée d'option d'achat de Baptiste Santamaria...
Oui, mais on a déjà 34 joueurs sous contrat. Et pas mal de milieux de terrain. On n'est pas dans une configuration, à date, où on a des obligations. On ne peut pas finir avec 9 milieux.

- Cela veut-il dire que vous croyez que Tanguy Ndombele peut être un milieu de Nice la saison prochaine ?
Ça, je ne sais pas. Ça fait 6-9 mois qu'il n'est plus dans sur le terrain, ou par intermittence. Je suis comme Saint-Thomas, je ne crois que ce que je vois. Si j'étais sûr qu'il puisse être opérationnel à 100 %, et pendant une saison, je ne me poserais pas de questions. Mais bon, ça n'a pas été le cas. Ce que je lui ai dit il y a un mois, en entretien, c'est : « Pour toi, avant que ce soit pour nous, trouve des solutions pour que tu puisses t'entraîner comme un joueur professionnel, c'est-à-dire quotidiennement, avec intensité, pour pouvoir jouer ». Aujourd'hui, on en est très loin.

- C'est devant que vous avez presque trop de joueurs. La gestion a-t-elle été délicate au printemps quand tous les blessés sont revenus ?
Non. Il y a eu quelques fois où, entre deux joueurs, ça ne se jouait pas à grand-chose. Mais souvent, quand je faisais mes choix, et quand j'en parlais au staff, on était alignés. Il n'y avait pas trop de discussions. Cela n'a pas été si compliqué que ça.

- Parce que certains avaient lâché ?
Non, pas lâché, mais il faut être performant tout le temps. À un moment, même Evann a été sur le banc. Je ne peux pas juste faire mes choix parce qu'à un moment ça a été le meilleur joueur de la saison. Si j'estime qu'il est moins bien... Il est revenu, il y a eu une remise en route contre Rennes, et hier (samedi) on l'a retrouvé.

« D'être 35e, de ne pas avoir gagné un match sur 8... Je ne peux pas vous dire que c'est plaisant à vivre. Mais si on avait gagné ce premier match contre la Real Sociedad, je suis certain que la dynamique aurait été différente »

- Avait-il compris cette mise sur le banc ?
Oui, ils le comprennent dans un premier temps, mais quand il y a 3-4 fois sur le banc, ils ne comprennent plus. Ce n'est pas grave. Tant que je serai entraîneur, ça se passera comme ça.

- Le gros point noir de votre saison, c'est la Coupe d'Europe. Vous êtes-vous parfois dit que c'était la honte d'être 35e ?
D'être 35e, de ne pas avoir gagné un match sur 8... Je ne peux pas vous dire que c'est plaisant à vivre. Mais si on avait gagné ce premier match contre la Real Sociedad (1-1, le 25 septembre) , je suis certain que la dynamique aurait été différente. Je ne sais pas si on se serait qualifiés. Mais on serait partis sur une victoire. C'est celui qui me laisse le plus de regrets. Et c'est Evann, notre meilleur buteur (13 buts toutes compétitions confondues cette saison), qui loupe le penalty de la victoire. Après, avec toutes ces blessures, j'ai fait le choix de faire tourner. Mais je n'ai pas trop de regrets sur les choix que j'ai faits parce que je pense qu'on était trop courts pour jouer les deux épreuves à ce moment-là. Si je devais le refaire, je referais la même chose.

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Evann Guessand a inscrit au moins un but et délivré au moins une passe décisive pour la quatrième fois cette saison en Ligue 1, face à Brest samedi, c'est plus que tout autre joueur. Opta.