Presse :
Abardonado, droit devant
Nice-Matin, le 05/11/2002 à 07h47
Prêté par l'OM après une parenthèse réussie à Lorient, le défenseur niçois nage en plein bonheur Et il rêve d'autres conquêtes avec sa nouvelleéquipe. Le « Gitan » a la foi et il est prêt à la faire partager à tout le groupe.
Il y a quinze jours, à Bordeaux, après un match amical contre les Girondins, les Niçois déjeunaient au centre d'entraînement du Haillan, dans un silence de cathédrale. Impressionnés, ils mesuraient tout ce qui les séparait encore d'un grand club et de ses installations magiques. La tête dans les nuages, ils se disaient que peut-être, dans quelques mois...
Arrive alors Jean-Claude Darcheville. L'attaquant marine et blanc fraîchement débarqué n'a pas encore eu le temps d'être bouleversé par le cachet majestueux de l'endroit. Son rire tonitruant déchire le silence. « Et il est où mon capitaine de Lorient ?, demande-t-il en cherchant Abardonado du regard. Est-ce qu'il vous fait les mêmes discours de guerrier qu'avec nous en Bretagne ? ».
L'accolade entre les deux hommes est sincère et franche. Ils s'embrassent comme du bon pain !
« Pancho » capitaine, remonteur de pendule, tribun de vestiaire ? Les « rouge et noir » ont du mal à le croire. Et pourtant, le néo-Niçois cache bien son jeu.
« Je suis plus réservé qu'on ne le croit. C'est vrai qu'une fois ou deux, j'ai pété les plombs avec Marseille parce que c'est la ville de mon coeur et que je ne supportais pas de perdre sans combattre. Mais au fond de moi, je ne suis pas comme ça. Et puis en allant une année à Lorient, en coupant le cordon qui me retenait à la famille, j'ai beaucoup réfléchi et j'ai mûri ».
Les fleurs des copains
Quitter ses parents et son environnement, ce n'est jamais simple. Encore moins pour un Gitan de sang qui cultive de vraies valeurs. Plus que la guitare (il n'en joue pas, il préfère les percussions), plus que les longues soirées autour d'un feu de camp, plus que la vie itinérante, plus que le folklore « Manitas », il préfère cultiver le sens de la collectivité, le courage, le don de soi. « C'est un gagneur, un équipier modèle, un type énergique qui aime se sacrifier pour le groupe. C'est un peu l'un des symboles de notre groupe », dit Eric Roy.
Damien Grégorini, qui le connaît aussi très bien puisqu'il partage sa chambre en déplacement depuis l'époque OM, va dans le même sens. « Il sait s'éclater quand il le faut et il cache bien son jeu. C'est un type super cool et facile à vivre. Sur le terrain, il donne tout et même plus. C'est un bonheur de le côtoyer car à chaque instant, il fait du bien à son entourage ».
Le kiné, Bruno Mignante, a été bluffé par le défenseur. « Pendant deux mois, je n'ai pas entendu le son de sa voix ! Pourtant, les autres me disaient que c'était un joyeux drille. Et puis, j'ai découvert un personnage attachant et plein de qualités ».
Gernot Rohr, qui l'a récupéré au dernier moment sur un coup de fil à Alain Perrin, ne cache pas son bonheur. « Sobriété, bon placement, sens de l'anticipation, il est dans le vrai. Quand on avance les mots de courage et de coeur qui sont peut-être des grands mots quand on ne parle que de football, je pense immédiatement à Pancho ».
Oublié Marseille !
Depuis le but de la 94ème et dernière minute à Lyon, les compliments pleuvent sur la tête du défenseur. Mais le garçon garde les pieds sur terre.
« C'est vrai que pendant quelques secondes, on se sent dans les nuages. On pense au plaisir que cela procure à tout le monde. On se souvient d'un seul coup que ce nul est arraché à Lyon sur le terrain du champion en titre et que l'on vient de croiser le fer avec les meilleurs attaquants sans être ridicule. Mais on sait aussi que c'était largement mérité et que l'on n'a rien volé».
Oublié momentanément Marseille et son OM qui lui ont tourné le dos après un début de carrière commencé dans une période plus noire que blanche, mais avec deux coupes d'Europe et six matches à la clé (avec Courbis et Casoni).
Presque oublié le prêt à Lorient ponctué d'une descente, mais aussi d'une victoire en Coupe de France qui orne l'étagère du salon.
Place à Nice et à son challenge de folie qui correspond en tout point à ce qu'il aime. « Une vraie aventure humaine pleine de complicité avec des gens qui ont des choses à prouver, des revanches à prendre. Aujourd'hui, j'ai envie de dire à tout le monde que mon rêve est de rejouer l'Europe avec cette équipe. Le parfum connu à Marseille et gagné avec Lorient, on peut de nouveau le respirer ici ».
Rafaêl et Marie peuvent être fiers de leur footballeur de papa. Le grand-père, un autre Pancho, pensionnaire de l'OM il y a quelques années, aussi.
Cet été, Pancho junior est allé déposer un cierge aux SaintesMaries-de-la-Mer, comme chaque année pour protéger les siens. Le dernier signe visible d'un Gitan heureux. Et puis, il se battra à chaque rencontre de toutes ses forces. Avec un petit « spécial » le 15 janvier, une date encerclée de rouge sur son agenda personnel. Ce jour-là , Nice recevra le PSG.
" Et ça, pour un Marseillais, c'est assez spécial ! C'est même le meilleur souvenir de ma carrière jusqu'à aujourd'hui, car contre eux j'ai marqué mon premier but en D1 pour ma deuxième apparition avec l'OM ! ".
Yves MERENS
Mardi 5 novembre 2002
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