Successeur de Frédéric Antonetti sur le banc de l'OGCN, Didier Ollé-Nicolle débarque sur la Côte d'Azur précédé d'une flatteuse réputation bâtie dans les échelons inférieurs. Fait de passion et de responsabilisation de ses joueurs, son discours, basé sur un coaching participatif, comme il le définit, tranche plutôt à Nice encore marqué par la forte personnalité de son prédécesseur.
- Didier, la meilleure recrue de l'OGC Nice n'est-elle pas au final Loïc Rémy, que vous êtes finalement parvenus à conserver au sein de l'effectif ?
L'idéal, c'était de le conserver, comme il était idéal de conserver tous nos jeunes joueurs avec une épine dorsale, dont fait partie prenante Loïc. Je pense en effet que c'est la meilleure recrue que l'on pouvait faire par rapport à un ensemble technique et sportif sur le terrain, mais aussi en termes d'ambition au niveau du vestiaire et indirectement du moral de l'équipe.
- Un départ aurait été un signal inquiétant et aurait remis trop de choses en cause ?
Il faut se garder de ce genre de discours extrémistes. Loïc fait partie d'un collectif, il possède une marge de manoeuvre au sein de l'équipe et une marge de progression individuelle intéressante. Il ne faut quand même pas oublier qu'à Lyon, il ne jouait pas et qu'ils voulaient s'en séparer. C'est à Nice qu'il a vraiment éclos, il faut l'avoir à l'esprit. Maintenant, ce n'est aussi qu'un élément d'un ensemble de 20 à 25 joueurs, certes avec un rôle et on veut lui confier un statut intéressant, mais il ne sera jamais rien sans ses coéquipiers.
- Sans chercher à stigmatiser son comportement, on vous sent plutôt indulgent (il coupe)...
Loïc a été très bien dans son comportement à l'entraînement, sur le terrain. Je n'ai même pas à me montrer indulgent, ça voudrait dire qu'il s'est passé quelque chose alors que c'est tout l'inverse. Je ne pense pas qu'il y aurait beaucoup de gens qui aurait réagi aussi bien que lui quand on a 20 ou 21 ans. Ça lui arrive pour la première fois, il se retrouve entre deux mouvances et ce n'était vraiment pas facile à gérer pour lui, comme ça ne l'était pas pour nous, qui n'étions pas totalement partie prenante, il a très bien réagi.
« Mounier ? Tout dépend de Lyon »
- Pour conclure sur les transferts, le dossier Mounier est-il pour vous toujours d'actualité ?
C'est toujours la même chose, Anthony appartient toujours à l'OL, il lui reste un an de contrat. Lyon était prêt à le céder il y a de cela un mois et nous nous étions mis tous les deux d'accord pour qu'il nous rejoigne parce que ça fait trois ans que je le suis. De son côté, le fait d'évoluer à Nice dans ce contexte avec Loïc et de faire aussi bien que lui l'année dernière, c'était son "trip" (sic). Lui veut venir à Nice, moi, je le veux, après, tout dépend de Lyon: s'ils le vendent à son juste prix, nous sommes toujours preneurs, sauf s'ils veulent toujours faire un amalgame avec l'autre dossier (Loïc Rémy). Le vrai dommage, c'est pour l'OGC Nice, parce que c'est un garçon qu'on voulait, et surtout pour le joueur confronté à quelque chose auquel il ne peut absolument rien. Et dans la vie, il n'y a rien de pire que de subir les événements.
- Revenons à la préparation et à cette crainte exprimée sur les décalages au sein de votre effectif, liés notamment aux nombreux sélectionnés africains. Comment faire ?
On y travaille. Pour l'instant, plus que des matches amicaux, nous avons effectué des séances d'entraînement étant donné que sur un effectif de vingt joueur à peu près, il y en a la moitié qui était là et l'autre moitié absente. Avec les charges de préparation, beaucoup de jeunes ont donc disputé ces premières rencontres amicales et c'était intéressant de les découvrir et de les intégrer au haut niveau. En ce qui nous concerne, le staff, on découvre notre effectif et jusqu'à présent, on n'avait pas tiré beaucoup d'enseignements de tout ça, ce n'est que depuis deux ou trois jours que la mayonnaise commence à prendre parce qu'il y a plus de qualité. Notre travail, c'est d'amener le groupe de la façon la plus adéquate possible vers le top de la forme.
- Plus que la pression du jeune technicien, est-ce que le fait d'arriver avec un discours neuf dans un club qui vient de conclure un cycle avec un entraîneur ne facilite pas les choses ?
Ça, ce n'est pas à moi de le dire. Il y avait un entraîneur, c'est une autre façon de faire. C'est une question qu'il faudrait poser aux joueurs. Il y a bien sûr une phase d'acclimatation des joueurs et de découverte de son effectif par l'entraîneur. Ça réclame du temps, mais je sens un groupe à l'écoute, qui commence à se lâcher sur le plan sportif et sur le plan humain, même s'il reste encore beaucoup de travail à accomplir pour devenir une équipe au sens noble du terme.
- Vous avez évoqué à votre arrivée au club les notions de coaching participatif et de liberté accordée à vos joueurs sur le terrain comme en dehors. Vous pouvez développer ?
En termes de management, il existe une méthode autoritaire et dictatoriale ou directive, je pense que cette époque-là est révolue parce que c'est usant à la fois pour les joueurs, qui ont à subir ça, mais aussi pour moi parce que ça n'est pas la conception que je me fais de mon métier. A l'inverse, quand je dis participatif, ce n'est pas le Club Med. Mais il s'agit d'un cadre de travail et de vie au quotidien bien déterminés, auxquels chacun doit se plier sans que le moindre détail ne flanche. On est en train de se caler, on se découvre les uns les autres au sein même du staff. C'est la même chose au niveau des joueurs auxquels on indique un cadre de travail très précis, à l'intérieur duquel on souhaite qu'ils aient beaucoup d'autonomie et de responsabilités. Ça n'est qu'un exemple, mais désormais, il n'est plus question de réveiller les joueurs après la sieste. Ce sont des grands garçons, ce ne sont pas des bêtas, il y a une autodiscipline qui s'impose.
« Ce qu'a connu Antonetti à Nice, je l'ai moi-même connu à Clermont »
- Une liberté qui doit se traduire également sur le terrain avec des schémas de jeu qui ne sont pas figés, mais susceptibles d'évoluer en cours de match ?
Autant notre rôle est de définir un cadre tactique par rapport aux joueurs, au niveau du placement, de la récupération du ballon et des fondamentaux de notre équipe. Mais une fois que ce sera acquis au niveau du jeu, on souhaite qu'il y ait beaucoup de créativité, d'expression pour que les joueurs ne soient pas enfermés dans un carcan. C'est notre volonté, ce sont de grands mots, de faire sentir aux joueurs au quotidien qu'on est là pour les aider et indirectement, il faut qu'on soit intransigeants sur certains principes et conciliants sur d'autres. Tactiquement, on aura deux ou trois systèmes de jeu qu'on va travailler régulièrement à l'entraînement, mais à l'intérieur desquels les joueurs devront pouvoir passer de l'un à l'autre en fonction des évènements. C'est compliqué parce qu'on a des joueurs jeunes, avec des cultures différentes, sud-américaines, africaines, européennes, à nous de leur permettre de jouer ensemble la même partition.
- Sans vous demander de commenter les raisons du départ de Frédéric Antonetti, celui-ci semblait regretter le plafonnement de l'OGCN. Le club est-il condamné au ventre mou ?
C'est le problème des cycles. Ce qu'a connu Antonetti à Nice, je l'ai moi-même connu à Clermont. Pour l'un comme pour l'autre, ça s'est très bien passé, mais à un moment donné, on se rend compte qu'on risque d'aller dans le mur parce qu'on connaît tout le monde et qu'on ne voit plus que les mauvais côtés. Lorsque je suis arrivé, les dirigeants m'ont mis au courant de la situation, on possède le quatorzième budget et je ne vais pas me plaindre de ça, ils m'ont aussi parlé du nouveau stade et du nouveau centre d'entraînement d'ici trois ans et je suis venu aussi pour ça. Ma mission est de mener le club le mieux possible sur cette période.
- Faire avec les moyens du bord et serrer les dents...
J'aimerais bien sûr pouvoir compter sur deux ou trois joueurs supplémentaires pour équilibrer mon effectif parce qu'on fait ce métier avec passion et on est heureux quand on gagne des matches et qu'on est bien classé. Il manque quelques petites choses pour être un peu plus serein. A nous et aux joueurs de faire nos preuves, de nous remettre en cause pour réussir. J'arrive en tour cas avec beaucoup d'envie et de fraîcheur, on évolue en Ligue 1, on a aussi des atouts à faire valoir et on n'est pas là pour se plaindre. Antonetti avait fait le tour de la question et il y a une certaine logique à rejoindre un club avec plus de moyens et d'ambitions. J'ai moi-même la même approche en tant qu'entraîneur venant de Ligue 2.
« J'étais supporter de Nice... »
- Depuis deux ans, Nice a perdu de nombreux cadres. Le club est-il condamné à être ainsi pillé et est-ce une motivation supplémentaire pour insister sur la formation ?
Des joueurs comme Ederson ou Koné n'étaient pas issus de la formation niçoise, le club avait surtout flairé de bons coups. Aujourd'hui, notre formation est jeune. Je lisais un article, où s'exprimait Antonetti, disant que la grosse différence rencontrée depuis son départ de Nice, c'est la qualité de la formation à Rennes avec des joueurs déjà prêts à sortir. On sait que Rennes a mis de gros moyens depuis plusieurs années sur la formation. De notre côté, on sait qu'on est tout le temps en danger par rapport aux sept ou huit plus gros budgets et qu'on peut sans cesse être attaqués, on vient encore de le vivre. D'où l'importance demain ou après-demain de développer nos ressources et notre budget pour pouvoir viser des objectifs plus ambitieux. On sait que ça ne pourra se faire qu'à moyen ou plus long terme. Dans l'immédiat, à nous de tirer la quintessence de ce groupe pour aller le plus haut possible. La problématique du développement du club n'est pas de notre ressort, c'est celle des dirigeants et des actionnaires.
- Peut-être plus instinctivement, Nice, ce maillot, les Aiglons, le Ray: ça représente quoi pour vous ?
C'est un maillot et un club qui m'ont tout le temps touché. Lorsque j'étais adolescent, j'étais supporter de Nice. Il y a un côté affect, qui était forcément important au moment du choix parce que j'avais deux ou trois autres propositions. C'est aussi le Sud et sa passion, avec cette exubérance, aussi ces aspects parfois un peu excessifs, mais on fait aussi un métier de passion. Ces couleurs, ces bruits, cette atmosphère, ce sont des ingrédients présents à Nice. A nous de faire en sorte que ces ingrédients penchent du bon côté de la balance.
Propos recueillis par SYLVAIN LABBE
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