Interviews :
Lionel Letizi : « Le plus chiant dans ce métier, c'est le
Chronofoot, le 26/11/2010 à 09h13
A l'occasion du lancement de la Casquette d'Or, Lionel Letizi est revenu sur le rôle si particulier de gardien de but, en exclusivité pour Chronofoot. Lionel Letizi, doublure à Nice et ancien titulaire dans les cages du PSG, en sait beaucoup sur le rôle de gardien de but. Avec toute l'expérience qu'il a accumulée du haut de ses 37 ans, 373 matches en Ligue 1 et 4 sélections en équipe de France, il était l'un des mieux placés pour parler de ce poste si particulier. Il a accepté de le faire en exclusivité pour Chronofoot, au moment du lancement des votes pour la Casquette d'Or 2010, qui récompense la plus belle boulette de gardien de l'année.
- Comment devient-on gardien de but, un poste si détesté par les gamins dans la cour d'école ?
Je pense que c'est une vocation, il faut que ça plaise rapidement. On peut commencer à un autre poste,
mais on y vient rapidement.
- Le gardien paraît isolé, aussi bien sur le terrain qu'à l'entraînement. Comment est perçu cette
forme de solitude ?
On est pas spécialement isolé. C'est vrai qu'on a un poste un part, mais dans un effectif on est trois voire quatre gardiens, il y a l'entraîneur des gardiens, etc. On ne se sent pas du tout isolé lorsqu'on évolue à ce poste.
- Quels sont les rapports entre les joueurs de champ et les portiers ?
On travaille avec eux. Les rapports ne différent pas du tout que ce soit avec les autres gardiens ou les
joueurs. Après, c'est sûr qu'on discute entre gardiens parce qu'on a un poste particulier. On connait les
subtilités du poste.
"On sait que les gestes d'attaquants seront plus mis en avant"
- Le pénalty est très certainement l'exercice le plus difficile pour un gardien de but. Que ressent-il au moment où l'attaquant s'apprête à tirer ?
Il ne ressent pas grand chose! (rires) Le gardien, sur un pénalty, il n'a rien à perdre. S'il l'arrête, c'est l'exploit et s'il le prend, c'est normal.
- Comment prend-il la décision de plonger de tel ou tel côté ?
Pour faire leur choix, il y en a qui se fient à leur instinct. D'autres utilisent la vidéo. Ils ont remarqué que par exemple, sur ses 10 derniers pénalties, tel joueur en a tiré 8 à droite et cela va influencer leur décision. Et, il y en a certains qui observent les gestes du tireur pour essayer de récupérer quelques indices. Le moment du pénalty a aussi de l'influence. Si c'est un pénalty qui est à la dernière minute qui peut donner la victoire à l'équipe ou si c'est un pénalty moins important, ce sera différent. Il y a plein de choses qui rentrent en ligne de compte.
- Est-ce qu'on aborde une séance de tirs au but différemment d'un simple pénalty ?
Oui! C'est différent parce que déjà , il y a une qualification en jeu. Après, ça dépend de la situation. Si
avant vous avez fait un bon match, vous serez mieux que si vous avez fait un match un peu moyen. C'est aussi une question de confiance, comme pour les attaquants.
- Pensez-vous que les gardiens ne sont pas assez récompensés pour leurs exploits, contrairement
aux attaquants justement ?
Au niveau des récompenses, ça a évolué. Maintenant, en fin de saison, il y a toujours le trophée du
meilleur gardien. Moi, quand j'ai commencé ma carrière, il y avait aussi quelque chose pour mettre un petit peu les gardiens en valeur. Chaque semaine, il y avait un top 10 des plus beaux arrêts de gardiens. Mais de toute façon, on sait très bien que les gestes d'attaquants seront plus mis en avant que les parades de gardiens.
- Ce n'est donc pas ce qu'il y a de plus difficile à vivre pour un portier...
Le plus chiant dans ce métier, c'est le ballon. Ils sont de plus en plus durs à arrêter. C'est pour favoriser
les buts, le spectacle. Du coup, ils nous mettent des ballons dont les trajectoires sont beaucoup plus
difficiles à juger. Par exemple, les gardiens qui jouent la Coupe du monde, ce sont que des bons gardiens. Et qu'il y ait autant d'erreurs d'appréciation de trajectoire, c'est qu'il y a vraiment quelque chose qui ne va pas. Et ce qui ne va pas, c'est le ballon, pas le gardien.
"Les buts 'casquettes', ça fait partie du métier"
- Justement, qu'est ce qu'un gardien ressent après avoir encaissé un but "casquette" ?
Il faut essayer de se remettre dans le match avec de la concentration en essayant de faire abstraction de ce qui s'est passé. Mais après, les buts "casquettes", ça arrive à tout le monde. Moi j'en ai pris aussi, ça fait partie du métier. Après, l'idéal c'est qu'il n'y ait pas de conséquences. Le plus important c'est de rester dans le match et essayer de ne pas en prendre un deuxième !
- En général, quand un gardien encaisse un but de cette manière, quelle est la réaction de ses
coéquipiers ?
Généralement, ils sont plutôt indulgents parce que ça n'arrive pas souvent. Et puis eux aussi ils font des erreurs. La seule différence ce que lorsqu'ils en font, il n'y a pas but derrière. Ils ont encore une corde de sécurité derrière, pas nous.
- Quel est le plus dur à vivre lorsqu'on encaisse un but gag ? Le moment-même ou la pression médiatique qui suit ?
Le plus dur, c'est sur le moment parce que quand on a fait une erreur, il y a toujours ce petit truc de se
dire "Merde". Mais après, ça va. On termine le match et on fait une bonne semaine ensuite pour préparer au mieux le prochain match.
- Retour -