Presse :
Nice peut tout perdre
Nice-Matin, le 12/05/2003 à 08h49
Après avoir longtemps espéré l'UEFA, les Aiglons risquent aussi de laisser échapper l'Intertoto sans un regain d'orgueil lors des deux dernières journées. Des Aiglons sans âme et amorphes, à Ajaccio. « Désormais, la seule récompense possible pour notre saison, c'est l'Intertoto », constate Yohan Bigné. « Il va falloir s'arracher pour cela. Et mettre un point d'honneur à bien finir pour notre public qui ne mérite pas qu'on lui serve un dénouement en queue de poisson ».
C'est ainsi : pour être tombés dans le (très) banal du côté de la cité impériale, les Niçois voient poindre le spectre de ne rien récolter du tout à l'arrivée (l'Intertoto ne devrait pas s'offrir au-delà de la 7 ou 8eme place). Autre cruel constat : dans une aventure, on retient souvent la fin. Et après le nul déjà triste contre Sedan, le risque est là , insidieux, de tomber dans les oubliettes de la normalité. De terminer dans le ventre mou, comme un promu valeureux,mais sans plus d'éclat. Il reste donc deux journées à nos Niçois, dont un grand rendez-vous au Ray contre Bordeaux (le 20 mai), pour prouver le contraire. Fermer la porte aux oiseaux de mauvais augure. Pour afficher, en clair, le retour du panache et du caractère, la marque d'une escouade détonante pendant quasiment toute la saison.
C'est vrai : la foi, la fougue et la malice ont permis de compenser pas mal de lacunes, depuis le départ d'une sacrée aventure, le 3 août dernier. Mais ce n'est pas tout : nous avons vu, aussi, tout au long du parcours, de la qualité chez ces Aiglons sans peur. Samedi, sur la pelouse bosselée de François-Coty, il ne restait plus grand-chose de tout cela. Le contexte, parfois inadmissible (explosions de bombes agricoles dans les tribunes entraînant des blessés chez les supporters de la Brigade Sud, injures racistes et quolibets de la part d'une minorité du public dès l'arrivée des joueurs au stade) ne saurait tout expliquer au sujet d'une apathie qui n'a pas laissé l'ombre d'une illusion.
Phénomène d'usure physique, pour des Aiglons ayant beaucoup donné (dix joueurs à plus de 30 matches) ? Gernot Rohr, avec le recul, hier matin, évoquait plutôt un phénomène de « fatigue mentale ». « A force de relever des défis, certains sont usés dans la volonté et n'arrivent plus à fournir les mêmes efforts », notait le coach. Ayant visionné la cassette du match, avant le décrassage à Charles-Ehrmann, Gernot Rohr tenait avant tout à dédouaner Sammy Traoré (auquel il reprocha vertement, à chaud, d'avoir utilisé des crampons moule « Sur le premier but, Esnaider lui fait carrément un croc en jambe par-derrière, ce qui laisse la voie libre à Seck. Même avec des vissés, franchement, je vois pas bien comment Sammy aurait pu tenir debout sur une telle action ».
Un but rapide qui a rendu caduque un dispositif renforcé misant sur le contre... Cette mise au point faite, Rohr dresse la leçon d'une défaite indiscutable. « Là où nous avons manqué de professionnalisme, c'est dans notre incapacité à se hisser au-dessus du contexte. Nous savions que l'arbitre aurait la pression et qu'Ajaccio jouerait à fond sa survie. Mais nous n'avons pas su trouver la réponse. C'est la preuve que nous ne sommes pas encore assez rodés ».
Vérités entre hommes
Des chiffres édifiants : contre les six équipes les mieux classées (Lyon, Monaco, Marseil Bordeaux, Auxerre, Sochaux) l'OGC Nice a empoché 17 points sur les 33 possibles. Contre les six équipes de fin de tableau (Troyes, Le Havre, Sedan, Rennes, Ajaccio, Montpellier), le Gym, cette fois, n'a réuni que 13 points sur 33 possibles...
Comme si l'OGCN était en peine de s'imposer à chaque fois qu'il lui revient, selon la logique du classement, de prendre les affaires à son compte.
« A la fin des courses, le manque de moyens techniques finit par se faire ressentir », analyse Gernot Rohr. « Le fait d'être plus motivé contre des grosses équipes, c'est un réflexe humain. Mais j'en fais le reproche à mes joueurs. Il faut savoir se sublimer, aussi, contre des équipes de plus faible réputation. Après le scénario d'Ajaccio, il faut être lucide. Et se dire que le plus étonnant dans cette histoire, c'est le fait de trouver Nice avec quinze points de plus que l'ACA ».
Il n'empêche. Le Gym se doit une réaction, d'orgueil. Les joueurs se sont réunis dans un vestiaire fermé, hier matin, et d'après ce que l'on en sait, se sont dit quelques vérités entre hommes.
L'intertoto, les Niçois la veulent. Toujours. Même si l'usure constatée aujourd'hui laisse perplexe sur la faculté de l'effectif à gérer une somme d'efforts supplémentaires. En cas de qualification, Rohr en ferait son affaire : « Nous gérerions la chose avec sagesse, sans griller nos forces », précise le coach. « Mais nous n'en sommes pas encore là ».
Et contre les Girondins qui vont venir au Ray pour décrocher la lune, pardon, la Ligue des champions, il faudra bien, cette fois, revoir du grand Nice pour y croire. Quand Pauleta affiche 21 buts et 7 passes au compteur, Darcheville, 11 buts et 8 passes, Kaba Diawara, pour le Gym, est à la fois le meilleur buteur (11) et passeur (5).
Saisissant décalage... Face à la puissance des moyens, l'envie de dépassement devra retrouver tout le sens que les Aiglons ont bien voulu donner à cette vertu, évaporée le temps d'une escapade insulaire. Parions qu'ils en sont capables !
Lundi 12 mai 2003
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