Nice sur le toit du monde

Le Comté de Nice a remporté la ConIFA, la Coupe du monde des minorités, régions ou Etats non reconnus par la FIFA. Une incroyable aventure humaine sur laquelle revient Cédric Messina, l'instigateur d'un projet soutenu par Hugo Lloris ou Alexy Bosetti notamment.

"C'est un peu comme Rasta Rockett." La référence de Cédric Messina n'est pas anodine. Pas de Jamaïquains ici, mais des Niçois partis défendre les couleurs de leur "patrie" à Ostersund en Laponie, avec plus de succès à la clé. Le Comté de Nice a remporté dimanche la ConIFA. Une compétition rassemblant les régions, minorités ou états que la FIFA ne reconnaît pas, telle la Laponie, le Darfour, l'Ossétie du Sud ou encore le Québec. C'est grâce au forfait de cette dernière équipe que la belle histoire a pris forme. "J'ai reçu fin avril un coup de téléphone pour me proposer d'intégrer la compétition, pour laquelle on avait envoyé une candidature, nous relate Cédric Messina, président de l'association a Countea de Nissa. Il a fallu pour ça qu'on monte tout le projet : trouver des joueurs, un staff, des équipements, créer une identité visuel, gérer les assurances..."

Bosetti et Lloris en "parrains"

Pour trouver des joueurs, il s'appuie sur son réseau, celui des entraîneurs Frédéric Gioria, adjoint de Claude Puel à l'OGC Nice, et Jean-Philippe Mattio, recruteur chez les Aiglons, et peut compter sur le soutien d'Alexy Bosetti et Hugo Lloris, qui se portent garants du projet. "Ils ont fait un peu de comm'", avoue Cédric Messina concernant les deux porte-drapeau du football niçois, susceptibles à l'avenir de jouer (pour le plaisir) sous les couleurs de La Selecioun, le nom de l'équipe composés de joueurs 100% niçois. Bosetti, connu pour son amour de Nice et de l'OGCN, aurait même "tout fait pour venir" s'il n'avait pas été blessé. Avec comme capitaine Eric Cubilier (ex-PSG), et des joueurs passés par le centre de formation de Nice et surtout nés "dans le Comté", la Selecioun montée en quelques semaines a ensuite rallié la Laponie.

Comme le Danemark en 1992

Un véritable périple entamé le samedi : Nice-Milan en bus, puis Milan-Copenhague en avion. Sur place, location de voitures direction Malmö, où l'hôtel réservé... est fermé. "Les gars sont partis directement à Ostersund, qui se trouve à 1170 bornes de Copenhague. Une nuit blanche, il n'y a pas mieux pour unifier l'équipe." Sur place, les Niçois retrouvent onze autre équipes, réparties en trois poules dans une compétition dont c'était la première vraie édition professionnalisée. "Il faut féliciter les organisateurs. Il y avait des sponsors, des retransmissions TV, et on pouvait même parier sur les matches en direct !", énumère Cédric Messina, qui rit de la cote attribuée à Nice au début de la compétition pour la victoire finale : 1 contre 10. "On s'est pris pour le Danemark à l'Euro en 1992. On a été repêché, personne ne nous attendait, et finalement..."

Match dès le lendemain à 10h

Finalement, tout s'enchaîne à merveille. La défaite d'entrée contre l'Ile de Man 4-2, "avec deux penaltys et un rouge contre nous", est anecdotique. Dos au mur, le Comté de Nice bat le Haut-Karabagh "par miracle" (1-0), termine son match à 22h30 le soir... pour revenir à 10h affronter la Padanie dès le lendemain. "Ils nous prenaient de haut avec leurs trois titres de champion du monde. On est passé en 3-5-2, on met un but de fou et on gagne 2 à 1", relate Cédric Messina. L'Ossétie du Sud, malgré un jeu rugueux, ne pèse par lourd en demi-finale : victoire 3 à 0 pour s'offrir des retrouvailles avec l'Ile de Man en finale. Avec à la clé un succès aux tirs au but (0-0, 5-3 tab) pour conclure la belle histoire. Une rencontre suivie en direct par plusieurs centaines de Niçois dans une salle mise à disposition par la Mairie, preuve que la ville a vibré aux exploits de ses représentants, félicités par le maire Christian Estrosi et accueillis par 250 fans en folie ce lundi soir.

"A l'opposée du football business"

Nice-Matin leur a fait l'honneur de sa Une, alors que la BBC et le Monde ont aussi consacré un article à "cette bande de potes arrivée sur la pointe des pieds, mais avec un état d'esprit formidable", assure Cédric Messina. Pour lui, cette ConIFA est "à l'opposée du football business". "C'était un peu foot, rock'n'roll et bières, comme les Coupes du monde des années 50. Tout le monde donnait sa vie sur le terrain mais se parlait dans la ville. Les équipes échangeaient sur leur culture, ça a été une incroyable aventure humaine." Aventure qui s'est terminée... au MacDonald's sitôt la finale terminée. "On devait vite reprendre la route pour l'aéroport", se marre Cédric Messina, qui veut désormais "pérenniser cette équipe, qui contribue à l'histoire de cette culture niçoise s'ouvrant vers le monde". La Selecioun donne désormais rendez-vous dans deux ans : elle aura un titre de championne du monde à défendre.

Frédéric Sergeur
Sport.fr